Depuis plusieurs années, Edith Maruéjouls, spécialiste en géographie du genre, étudie la façon dont les cours d’école sont aménagées. Si cela peut paraître à première vue une problématique d’enfants, c’est en fait une question bien plus sociétale que ça.
L’espace public est conçu et dominé par les hommes. Il existe des pissotières, mais peu de toilettes fermées, les rues sont parfois mal éclairées et les trottoirs peu larges favorisent le harcèlement de rue. Si de plus en plus de villes françaises et européennes tentent de rendre les espaces publics plus mixtes, pour Édith Maruéjouls, il faudrait commencer par les cours d’école. “La cour de récré traduit la relégation dès l’enfance des femmes à l’intérieur du foyer” justifie la chercheuse.
Elle a observé des dizaines d’écoles et a discuté avec des centaines d’enfants qui lui ont expliqué la façon dont la cour est utilisée. Le constat est simple : les garçons ont plus d’espace, le plus souvent au centre de la cour tandis que les filles sont reléguées sur les côtés. La cour est réservée aux sports et majoritairement au football, à connotation masculine. Il en va de même avec les équipements installés par les écoles ou les mairies, il s’agit de paniers de basket, de cages de foot tandis que les filles se contentent des bancs. Il reste peu de place pour les jeux calmes et créatifs, loin de la compétition et des mouvements. Ils sont d’ailleurs qualifiés de « petits jeux de filles » par leurs homologues masculins. Édith Maruéjouls incite à réfléchir à de nouveaux aménagements et partage du territoire dès le plus jeune âge.